Comment la télévente chez ENGIE a-t-elle évolué de manière significative pour devenir plus respectueuse et plus responsable ? Découvrez-le dans cette interview de Pierre Poure, responsable de la télévente chez ENGIE.
Quelle est aujourd’hui la valeur ajoutée de la télévente comme point de contact humain dans un contexte de commerce conversationnel qui se digitalise prestissimo ?
Pierre Poure : Beaucoup de personnes ont encore besoin d’entendre la voix d’un conseiller. Le digital s’impose partout mais il n’est pas fait pour tout le monde. On le voit quotidiennement avec nos clients. Si on arrive encore à vendre par téléphone, bien que sur des volumes moindres, c’est la preuve qu’il existe encore une clientèle qui souhaite être écoutée et conseillée en direct. Mais l’époque de la télévente de masse est révolue. Nous nous orientons différemment, nous sommes passés sur ce qu’on appelle de la « télédentelle ».
De quelles façons, humaine, technologique et règlementaire, la télévente a-t-elle dû évoluer de manière à générer une relation client plus positive au cours des dernières années ?
Pierre Poure : Fin 2019, afin de changer notre image durablement, nous avons décidé de radicalement changer sur les aspects de télévente, des scripts et des délais de rétractation. Notre objectif de volume de ventes en électricité et en gaz est devenu un objectif de qualité. Pour être efficace, la télévente doit respecter le client ou le prospect. Désormais nos process laissent un vrai choix au client. On lui présente l’offre, il y réfléchit puis on le rappelle.
Nous avons également mis en place une nouvelle charte commerciale permettant d’adapter nos pratiques et nous différencier de nos concurrents. Nous mesurons nos objectifs de performance à travers nos indicateurs de qualité et en priorité : SAT, NPS, Churn, Taux de Rétractations et de Réclamations.
Puis, nous avons intégré dans notre charte des valeurs un choix de cinq « comportements » qui reflètent nos convictions et le vœu des clients, et que nous souhaitions mettre en avant aussi bien au niveau de nos collaborateurs, que de nos prestataires. D’abord, la performance, qui doit se distinguer avant tout par la qualité du discours et de toute la communication. Aussi, le respect du client, certes, mais plus généralement de tous nos interlocuteurs. L’engagement de toutes nos équipes à porter cette charte de valeurs. La transparence qui n’admet qu’aucune information erronée ne soit transmise, et qui implique de rester en permanence dans une démarche explicative : de dire quand on ne sait pas, et de s’assurer que le client a bien tout compris. Et enfin la sincérité, qui découle naturellement de la transparence.
En quoi les évolutions de vos pratiques commerciales et de vos valeurs répondent-elles aux besoins et aux usages du consommateur actuel ?
Pierre Poure : Aujourd’hui, le client ou le prospect est sollicité à tout moment, sur tous les canaux, par tout le monde : l’énergie, les telcos, les mutuelles, les assurances… Face à ce constat, nous appelons moins souvent, moins longtemps et nous nous positionnons davantage sur le conseil et le confort que l’on peut apporter aux clients. Il convient d’écouter, de ne pas harceler ni forcer et de se rappeler que le client peut nous quitter à tout moment.
Comment s’est passée votre collaboration avec Foundever pour vous aider à atteindre l’ensemble de vos objectifs de qualité ?
Pierre Poure : Quelles que soient les campagnes ou les prestations, qu’il s’agisse de la contractualisation, des appels sortants, de reconductions… Nous suivons les mêmes indicateurs, et faisons face aux mêmes engagements de valeur. Nous avions besoin d’un partenaire capable de s’adapter facilement et de s’aligner sur nos valeurs. Nous avions visité plusieurs sites de Foundever et été très impressionnés par la maturité de leurs équipes, leur esprit très collectif et la façon dont ils étaient capables de soutenir les clients à travers chaque étape d’une transformation importante, ce qui démontre de véritables capacités pédagogiques et des qualités de technico-commerciaux qui s’avéraient décisives pour nous, aussi bien pour l’accompagnement du changement que pour le déploiement de notre offre de solutions de mobilité verte.
Au moment où les tarifs explosent dans notre secteur d’activité, la relation commerciale est extrêmement sensible et critique. Auparavant, nous avions toujours le même tarif, on vendait toujours la même offre. C’était un « rituel ». Aujourd’hui, tous les trois ou quatre mois, l’offre pourra évoluer en fonction des prix volatiles de l’électricité ou du gaz. La posture change : à chaque fois, il faudra présenter les avantages de l’offre – même si elle est moins attractive. Tout est à réexpliquer. Tout est dans la pédagogie. C’est un changement radical et Foundever a très bien compris ce que nous souhaitions faire.
Vous avez divisé par 4 vos volumes d’appels. Vous êtes-vous positionnés sur de nouveaux canaux de communication, et/ou exploitez-vous de nouvelles technologies pour compenser cette perte de volumes ?
Pierre Poure : Notre canal web a pris beaucoup d’ampleur et les volumes de vente au travers du canal web ne cessent de se développer, phénomène qui s’est renforcé pendant la crise sanitaire au point qu’en 2020 et 2021, ce canal a explosé tous ses objectifs, compensant une partie de nos pertes. L’autre canal qui est monté en puissance depuis deux ans c’est notre canal pure player.
Face à la concurrence, notre objectif final est qu’un client qui rentre chez ENGIE reste chez ENGIE, ce qui dépend de la qualité de la relation de vente et du fait d’accorder un vrai temps de réflexion. Aujourd’hui, même si on réalise moins de ventes, on a un taux de rétraction qui est passé de 15 % avant qu’on ne change nos process, à 2-3 % maintenant !
A plus long terme, de quelles façons les entreprises vont-elles bénéficier de ces nouvelles bonnes pratiques de la télévente et comment favorisent-elles vos prochaines ambitions de développement?
Pierre Poure : Pour l’instant la règlementation n’est pas assez rigoureuse. Une fois que le marché sera assaini, je pense qu’on regagnera en joignabilité, car les clients sauront à qui ils ont affaire. Pour l’instant, ils rejettent tout le monde en bloc à cause des pratiques sauvages persistantes de certains.
Selon vous, quels sont les prochains enjeux et que reste-t-il encore à faire pour pouvoir parler de véritable télévente « responsable » ?
Pierre Poure : D’abord, il faut que la règlementation se renforce. S’il n’est pas mieux encadré, ce métier est voué à disparaitre, c’est une réalité économique. Il y a donc une responsabilité du gouvernement à agir d’une part, et des acteurs à changer de modèle de vente de l’autre. Pour les personnes qui font ce métier, il est beaucoup plus valorisant de passer à une relation qualitative avec le client, que de faire du martelage qui n’a plus du tout de sens pour personne.
Le deuxième enjeu, c’est de réorienter nos campagnes sur les ventes d’équipement ou d’options qui facilitent la vie du client dans un contexte de transition énergétique et qui l’aident dans le contrôle de sa consommation. Ce seront des campagnes plus précises et ciblées, autour des exigences de la mobilité verte et de l’efficience énergétique. Il y aura un intérêt accru pour nos conseillers qui vont traiter ces sujets avec les clients. Ils endosseront un rôle qui réclame une nouvelle expertise et des niveaux de compétences plus importants que ceux du conseiller commercial parce que le secteur se complexifie, et que le marché et le client le demandent. C’est une vraie campagne à enjeux urgents qui est suivie par le groupe. Il ne s’agit pas simplement d’un virage stratégique pour ENGIE, mais c’est une question de survie pour tous. Et bien sûr, le dernier enjeu « responsable », c’est de continuer à mener nos campagnes avec des objectifs de satisfaction et de NPS très élevés. Aujourd’hui, nous maintenons un taux de satisfaction client à 93% et nous avons l’intention d’y rester…